35 - Le point sublime

“L'humanité a besoin de sublime. Le sublime du sublime, c'est l'art. Le sublime de l'art, c'est l'avant-garde.”

Roland Topor, Mémoires d'un vieux con

N'en déplaise aux détracteurs du docteur Ernst Gräfenberg, détracteurs que je prends pour ma part pour de bien piètres coups, impatients et peu explorateurs, le "point sublime" existe bien, il se trouve dans les Monts de l'Espinouse. Les géographes étant bien plus avertis que les sexologues, il est même cartographié, avec précision. Malheureusement situé dans une zone interdite d'accès, la géographie rejoint la morale judéo-chrétienne : c'est un fait, tout ce qui donne du plaisir est illégal, immoral... ou très lourdement taxé.

Cet été j'ai donc fait une (toute petite) incursion hors piste, lors d'une balade du sommet de l'Espinouse jusqu'à la chapelle de Saint Martin du froid. Belle balade qui alterne forêts de hêtres, de pins, landes de bruyères en fleurs, granit, tourbe, prairies à vaches.

Je prends des risques, le "point sublime" est à l'intérieur du parc naturel interdit d'accès : réservé aux mouflons de Corse, introduits ici en 1950. Transgresser l'interdit, est-ce voler aux mouflons ?

Dans ce paysage rien d'autre que 4 nuances de vert, 2 nuances de mauve.

Si l'on en croit le port torturé des arbres, premiers indicateurs du géobiologue, c'est un lieu de fort tellurisme, parfait pour se reconnecter à une certaine matérialité, ce qui est presque toujours le cas sur les sols granitiques. Oui, on nous dit que les sols en granit émettent assez fortement du radon, un gaz radio-actif. Et c'est vrai. Pourtant il existe des centenaires en Bretagne : les causes et les effets ne seraient donc pas aussi mécaniques ? Ici le fort tellurisme est équilibré par l'altitude : la montagne code l'élévation spirituelle. Et d'ailleurs, peut-on atteindre Ciel sans un ferme appui sur Terre ? & nous voilà revenus au point de départ de ce texte !

Qui voudrait d'une Vie où il n'y a point de sublime ?